Commentaires de gestion
La performance de notre portefeuille en ce mois de mars 2020 est de -21,23%, ce qui porte notre performance 2020 à -24,02%.
Ces chiffres sont à comparer avec une performance 2020 de -20,67% pour le S&P 500, de -24,08% pour le Dow Jones, et de -27,23% pour le CAC 40 : Si nous sommes à peu près en ligne avec tout cela, nous ne pouvons pas en être pleinement satisfaits. Mais nous avons quelques raisons d’être plus optimistes pour l’avenir.
Déjà, les performances des actions de notre portefeuille à change constant ont été meilleures que cela, mais nous avons été fortement impactés par la baisse du dollar canadien (CAD) face à l’euro (la baisse a été de -5,4% sur la période, et la plus grande parte de notre portefeuille était cotée dans cette devise). Toutefois, notre principale participation cotée en dollars canadiens est une entreprise qui détient du cash en USD, ce qui fait que leur valeur intrinsèque de son cash en CAD a en fait augmenté sur la période (en dehors de tout autre impact sur l’activité).
Par ailleurs, les nouvelles additions au portefeuille ont été nombreuses et ont contribué positivement à notre performance sur les 15 derniers jours du mois. Par exemple, la plupart des nouvelles actions ajoutées la semaine du 16 mars ont délivré une performance comprise entre +21 et +46% sur notre courte période de détention. On parle d’entreprises profitables, qui cotent à 2-3 fois leurs cash-flows annualisés, et ces derniers devraient même croître exponentiellement sur le second trimestre 2020.
Nous avons encore ajouté de nouvelles positions au cours de ces deux derniers jours, avec là aussi une performance court terme satisfaisante.
Mais tout cela n’a pas suffi à compenser les très fortes baisses du mois sur nos positions historiques : en effet, les nouvelles positions ne représentent encore que le tiers de notre portefeuille aujourd’hui alors que nos positions historiques en constituent toujours les deux tiers.
Malgré notre déception sur la performance à court terme, nous gardons espoir : notre première position historique, une entreprise dont nous sommes actionnaires depuis bientôt 7 ans, continue à générer beaucoup de cash et n’est en rien impactée par COVID 19. Elle devrait continuer à retourner beaucoup de capital aux actionnaires, aussi bien par des rachats d’actions que des dividendes.
Notre seconde position historique, une entreprise pharmaceutique, ne connaît également aucun impact dans son activité.
En revanche, notre entreprise pétrolière ne pourra vraisemblablement pas survivre avec un pétrole à 20$ pendant plus de deux ans, même si c’est pour nous la meilleure entreprise de son secteur dans son pays.
Elle serait parmi les dernières à mourir, mais il faut se rendre à l’évidence : elle ne peut pas faire de profit à 20$ par baril (elle peut à 30$, mais pas à 20). Comme elle cote à un vingtième de ce que serait pour nous sa juste valeur dans un environnement raisonnablement pessimiste de pétrole à 50$ (où la plupart des entreprises du secteur dans le monde ne peuvent pas faire de profits durablement), nous conservons la position tout en adoptant une stratégie de couverture dans une hypothèse de pire cas.
Le management (qui est exceptionnel dans ce secteur à notre sens) continue à acheter des actions alors que le cours a baissé de 80% environ, mais nous devons vraiment envisager tous les scénarios, en étant à la fois offensifs et prudents.
Nos nouveaux ajouts sont donc des positions de couverture sur le contexte pétrolier, ainsi que quelques entreprises de très grande qualité, avec des activités défensives (software, agro-alimentaire) en très forte croissance alors que leurs valorisations reflètent plutôt des perspectives de décroissance.
Enfin, nous avons ajouté une entreprise historiquement profitable qui cote aujourd’hui à 40% de son cash net de toutes les dettes. Cependant, ce n’est pas un très bon business à notre avis et il pourrait être impacté par la crise si la reprise venait à s’éterniser : nous avons donc limité notre exposition (bien que le business ait racheté 29% de ses actions à un prix plus de 7 fois supérieur au prix actuel il y a 9 mois tout en gardant un bilan très solide).
La crise du COVID 19 est-elle vraiment une opportunité ?
Dans notre précédent article, nous avons affirmé que cela pouvait être une bonne occasion pour commencer à préparer sa retraite.
Nous voudrions profiter de ce reporting pour apporter une perspective supplémentaire à ce propos.
Si nous pensons toujours que COVID 19 en tant que tel ne peut pas avoir d’impact ni sur les dynamiques fondamentales des business à long terme, ni sur l’humanité en tant que telle (ce sont nos réactions au COVID 19 qui causent une crise, pas le virus en lui-même), nous voulons souligner quelques changements potentiellement importants que cette crise est susceptible de causer dans le monde des affaires et dans l’économie réelle. Nous ne tenons pas à entrer dans un discours alarmiste : nous croyons fermement dans la capacité des êtres humains à surmonter (à terme) tous les défis qui s’offrent à eux.
Nous devons simplement nous préparer à toutes les éventualités et investir en connaissance de cause.
Quelques conséquences de la crise du COVID 19 sur les entreprises
1 – L’accès au financement sera vraisemblablement réduit en dehors des dispositifs de soutien des Etats.
Pour les business non profitables, cela signifiera moins de potentiel de refinancement. Certaines licornes d’hier qui se développaient grâce aux financements disponibles et abondants pourraient devenir les fossiles de demain.
2 – Les compagnies fortement endettées vont avoir des problèmes à se refinancer.
Dans le meilleur cas, les taux d’intérêts pour elles vont exploser, dans le pire cas, elles disparaîtront ou tomberont aux mains des créanciers. Dans les deux cas de figure, une partie potentiellement importante de la valeur sera détournée des actionnaires (dans le meilleur cas au profit des créanciers, et dans le pire au profit de personne).
3 – Les compagnies avec des charges fixes élevées et un chiffre d’affaire en déclin (telles que les compagnies aériennes et les commerces physiques par exemple) vont, elles aussi, rencontrer des difficultés pour survivre.
Un bail-out par les Etats pourrait s’avérer nécessaire pour ces secteurs clés de l’économie (tant en termes de nombre d’emplois qu’en termes de services important pour notre société de consommation).
4 – Un scénario de dépression économique qui durerait quelques années ne peut pas être totalement exclu.
Nos réactions au COVID 19 et les incentives des politiques pourraient mener à des politiques de confinement prolongées plus que strictement nécessaire (la nécessité venant notamment de l’incapacité de notre système de santé à prendre en charge des millions de personnes simultanément dans les hôpitaux si l’épidémie venait à dégénérer avant le développement de l’immunité de groupe).
En effet, il convient de se rappeler que les hommes politiques ont pour priorité d’être réélus, et donc de gagner des voix.
Si l’un d’eux (par exemple, un président d’une grande puissance mondiale qui viserait un second mandat) venait à décider de lever le confinement et que quelqu’un venait à mourir du COVID 19 après cela, ses concurrents ne manqueraient pas de faire du bruit dans les médias et ses chances de réélection seraient amoindries.
Plus le confinement est prolongé, plus les économies mettront de temps à redémarrer. Rappelons que la Chine n’a toujours pas pleinement redémarré alors que le confinement y est terminé.
Dans un tel cas de figure, les business les plus résilients finiront tout de même par ressortir plus forts en bout de ligne (même si cela devait prendre des années), mais les autres auront quelques (sérieux ?) problèmes.
Si nous ne souhaitons aucun de ces scénarios, il est de notre devoir d’être prêts pour toutes les éventualités.
Investissons de l’argent dont nous n’avons pas besoin, avec prudence
Aussi, profitons de l’occasion pour rappeler combien il est important d’investir uniquement de l’argent dont nous sommes sûrs de ne pas avoir besoin.
Tout cela pour dire qu’il y a sans doute de vraies opportunités aujourd’hui, mais que nous devons vraiment les sélectionner avec le plus grand soin. Nous pourrions être moins exigeants et aller vers des business médiocres à prix cassés si nous étions certains que le pire est bien derrière nous, mais nous ne ferons pas ce choix précisément parce que nous n’en sommes pas si sûrs.
Bref, nous sommes plus offensifs dans notre portefeuille, mais nous tenons à rester très sélectifs et assez mesurés dans la plupart de nos pondérations (nous n’avons plus qu’un seul business qui représente plus de 10% de notre portefeuille aujourd’hui, et ce business génère énormément de cash et n’est en rien impacté par COVID 19).
Sur ce, bons investissements !
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